La présidentielle
est morte, vive la politique !
par Alexandre
Piquard - publié le 09/04/02 - Réagir
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Presidentielles.net appelait à voter pour le changement
et ne croyait pas à Le Pen au second tour. Erreur... Avec la mutation
inattendue de l'élection, nous voterons "nécessaire". Et lançons un espace
pour relayer le bordel ambiant : RiPosts.
Vendredi 19 avril, nous évoquions, dans un édito titré
"Tout est politique", la possibilité de voir Jean-Marie Le Pen accéder
au second tour : "Mais que les Français ne seraient-ils prêts à faire
pour ne pas mourir d'ennui ? Ces facétieux électeurs, dont on dit maintenant
qu'il jouent à manipuler les sondeurs, voteraient même pour l'innommable
: Jean-Marie Le Pen. Le vieux para de la droite extrême se délecte ces
derniers temps des scores pharamineux que lui prêtent les sondages (jusqu'à
14%, contre seulement 11% en 1995, pour 15% au premier tour). Il évoque
avec malice l'idée de créer une éventuelle "divine surprise" en parvenant
au second tour. Cela n'arrivera pas." Erreur...
Mais qui est le coupable ?
Que dire ? Au terme de près de trois mois d'une campagne pour le moins
décevante, nous proposions aussi de "chercher le changement" parmi les
16 candidats du premier tour, plutôt que de "voter utile" contre son gré.
C'était sous-estimer la faiblesse des poids lourds Jospin et Chirac, qui
apparaissent aujourd'hui plus fluets que jamais. Des deux sortants, nous
disions qu'ils jouent "un ballet indigné, chacun rejetant sur l'autre
la responsabilité du réveil de la bête immonde. La désaffection des électeurs,
l'affaissement de la démocratie, la mauvaise image de la classe politique,
c'est pas moi, m'sieur !" Depuis quelques jours, tous jouent au grand
jeu de : "A qui la faute ?". A ce jeu-là, nous pensons en tout cas qu'il
y a un fossé entre ceux qui rendent les électeurs, ces immatures, crétins,
protestataires, bornés et suicidaires, responsables de tous les maux et
ceux qui demandent aux homme politiques de reconnaître qu'ils ont, dans
leur quête du pouvoir, failli à leur devoir : proposer un projet de société.
Sévèrement urné
Maintenant que le pire étant arrivé, que faire ? Veiller qu'à ce pire-là
ne succède un autre, pire encore. Et refuser la politique du pire passe
ici par le vote, tout simplement pour tuer toute chance que Jean-Marie
Le Pen soit élu Président de la République. Et pour que son score au second
tour ne constitue pas un nouveau triste record, qui lui donnerait une
assise électorale pour le futur et banaliserait son importance sur l'échiquier
politique. Disons-le : il faut voter Chirac. Pour rendre la chose possible
à ceux qui auraient juré ne jamais en arriver là, chacun trouve déjà des
agréments divers et s'invente des stratégies originales : l'un votera
avec des gants, l'autre en se bouchant le nez, le dernier s'entraînera
tous les jours avec de faux bulletins, pour que sa main ne tremble pas
le 5 mai. Le résultat sera le même. Il vaut mieux rire que pleurer.
Le débat n'aura pas lieu
L'élection a muté. On pouvait faire un "vote de coeur" ou un "vote de
raison", un vote "protestataire" ou un vote "utile". Il ne nous reste
que le vote "nécessaire". On pourrait dire "forcé". On souhaitait un débat
entre des visions politiques et on se plaignait que le grand cirque de
la campagne ne nous en donne que des bribes, entre les petites phrases
et les coups de comm'. Il est aujourd'hui officiellement mort, et enterré.
Que Chirac refuse d'affronter Le Pen dans une joute télévisée en est le
symbole. Si plus personne ne joue le jeu, c'est peut-être parce que ce
n'est plus un jeu. Dans la mutation inattendue, Presidentielles.net change
aussi. Suivant notre vocation de média éphémère, nous voulons montrer
la campagne différemment et, disons-le, redonner goût à la politique.
La présidentielle est morte, vive la politique !
Le fameux "séisme" de dimanche nous a plongés dans un paradoxe : il règne
un incroyable bordel ambiant dont le slogan, autant que "Non au FN !",
pourrait être : "La présidentielle est morte, vive la politique !" Nous
avons maintenant envie de montrer le bordel ambiant, les élans citoyens,
les slogans assassins, la spontanéité militante, les mails enflammés,
les mobilisations locales, les rappels salutaires, les pastiches révélateurs,
les insurrections de pensée, les longs discours, les chants de rues, les
clichés qui en disent long, les éclats de poésie, les refontes du monde
en chambre, les débats à mort et les causes perdues. En direct. Et tant
que ça dure... On a appelé ça "RiPosts", parce qu'il fallait bien lui
donner un nom. Ca commence demain. On entend souvent qu'il n'y a pas d'idées,
pas d'engagement, plus de politique. Faut voir.
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