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La Supervérité sort de la bouche des enfants

par Alexandre Piquard - publié le 09/04/02 - Réagir à cet article sur le forum

Juliette, 5 ans, regarde les Guignols tous les jours avec sa mère. Elle aime Supermenteur et Chirac parce qu'ils sont "drôles" et "gentils". Sa mère de gauche est à bout.

"C'est l'heure de PPD !" Si elle l'avait oublié, Juliette, 5 ans, rappelle à sa mère qu'il est temps de regarder les Guignols. Assises sur le lit de sa chambre, Sophie et sa fille s'installent. La marionnette de Chirac apparaît dans la lucarne derrière PPDA. Le présentateur lui pose une question embarassante sur les dépenses de nourriture exorbitantes des locataires de la mairie de Paris. Comme tous les soirs la marionnette-candidat invoque un prétexte ("Je crois qu'il faut que j'aille m'épiler le nombril") pour s'éclipser un instant et réapparaître en habit de Supermenteur. Le visage de Juliette s'éclaire. Elle rit d'avance. Le super héros qui vole chaque soir au secours de la droite avec ses justifications mensongères invoque que les Chirac dépensent beaucoup parce qu'ils aiment la bonne chère et les animaux rares : "Que celui qui n'a jamais abusé d'un bon mammouth aux pruneaux leur jette la première pierre !" Juliette n'a pas bien compris la tirade mais se marre comme une bossue, comme les 2,5 millions de téléspectateurs qui regardent le show-vitrine de Canal Plus. Pour elle comme pour les autres, Supermenteur, imaginé par ses créateurs deux mois avant l'élection, est bien le personnage phare. Mais qui est donc ce Supermenteur ? "Derrière le masque, c'est Chirac. Je sais. Je reconnais son nez et sa voix", explique-t-elle. Juliette ne se rappelle plus quand elle a commencé à regarder les Guignols : "J'étais toute petite", s'excuse-t-elle. Mais elle sait très bien ce qu'elle pense de l'alter ego satirique du Président : "Il est gentil." Pourquoi se déguise-t-il ? "Pour faire croire des choses aux autres." Pourquoi ment-il ? "Il veut aider les autres, pour les sauver.

Pourquoi ? Passque !
Comme prévu par les auteurs des Guignols, le contraste entre Chirac et Jospin est frappant. "Josmin, j'aime pas trop", affirme Juliette, qui a un peu de mal avec le nom de cette marionnette "à tête plate", moins familière. Que fait-il dans la vie ? "Il veut être président à la place de Chirac. Il est moins rigolo." Pourquoi ? "Parce que c'est pas Supermenteur !" CQFD. En fait, Juliette ne comprend souvent pas un mot de ce que dit la marionnette du premier ministre. A l'écran, un montage met en parallèle les visites de Chirac et Jospin en Guyane. Chirac danse une sorte de biguine avec des locales en boubous. Jospin, lui, soliloque sur la réforme de la fiscalité et des retraites dans un jargon obscur. Et ainsi de suite. Parce qu'elle a tout de même bon coeur, Juliette propose après un temps de réflexion une solution pour Jospin le mal-aimé : "Peut-être Chirac pourrait faire une place à Josmin pour qu'il puisse présider lui aussi un peu ?" Ne voilà pas pas là l'intuition enfantine de la cohabitation, cette exception française redoutée de tous les politiques ?

"Le président, c'est comme le roi."
"Une fois, en pleine rue, Juliette s'est mise à chanter 'Chirac Chirac J'aime Chirac. J'avais la honte ! Quand je lui ai dit qu'elle ne pouvait pas vraiment l'aimer puisqu'elle ne le connaissait même pas, elle m'a répondu. 'Si ! Je l'aime, et il est beau !'. Il y avait une sorte de passion dans sa voix..." Et les remarques de sa mère de gauche sur le grand nez du président n'y ont rien changé. En pédagogue politique, Sophie a donc expliqué à sa fille que les Guignols montraient Chirac en menteur parce qu'il avait des choses à cacher et qu'on le soupçonnait fortement d'avoir volé de l'argent public. Sans se démonter, la petite a tenu tête : "Il est président. Si il veut pas dire quelque chose, il est pas obligé. Les policiers peuvent pas attraper Chirac pour le mettre en prison. C'est interdit de mettre le président en prison. C'est comme le roi." Voilà une logique impunitive qui ne déplairait pas aux pachas de la mairie de Paris et ferait bondir leurs détracteurs comme le chevalier blanc socialiste Arnaud Montebourg, qui réclame depuis des mois la levée de l'immunité présidentielle. Comme bon nombre de Français qui confessent dans les sondages que les affaires importent peu, Juliette ressent bien une forme d'attirance pour le personnage malin, magouilleur et bon vivant : "Moi, j'aime bien les voleurs." Le jugement de Juliette sur la plus grande intégrité de Jospin devient alors à double tranchant : "Jospin volera pas s'il devient président." (lire "Faut-il être malhonnête pour être président ?")

Supermenteur contre Pif Gadget
Pour Sophie, qui a toujours été de gauche, les réactions de Juliette prouvent le parti pris des Guignols : "Franchement, la différence de traitement est flagrante entre les marionnettes de Chirac et de Jospin. L'un est un bel enfoiré mais rigolo. L'autre est a l'air d'être honnête et d'avoir des trucs à dire mais il prêche dans le désert, a constamment un balai dans le cul et reste foncièrement chiant... " Les Guignols lui font d'ailleurs mettre des "patchs anti-chiant" avant d'aller se coucher avec sa philosophe de femme. Dans sa jeunesse, Sophie a elle été élevée au Pif Gadget, dans une famille de gauche, avec grands parents ouvriers communistes et oncle pro-soviétique jusqu'à il y a quelques années. Au premier tour, Sophie votera probablement pour Olivier Besancenot, le jeune candidat de la Ligue communiste révolutionnaire. Au deuxième tour, ce sera Jospin mais la mort dans l'âme, par défaut." explique-t-elle.

Bernaden = Bernadette + Ben Laden
A part aflliger sa mère, quelle influence peut bien avoir sur un enfant un show politique satirique, s'il est sur le même plan que les Teletubbies ou les Pokemon ? "Ce n'est pas vraiment la même chose. Juliette a compris que les Guignols représentent des personnes réelles mais seulement parce que je lui ai montré." Un soir, Sophie a zappé entre les Guignols et le JT de TF1, pour montrer à sa fille le "vrai" PPDA. "Même face à l'image, elle ne voulait pas me croire. Elle me disait qu'ils n'avaient rien à voir parce que la marionnette avait beaucoup plus de cheveux !" se rappelle Sophie. La frontière entre fiction et réalité peut en effet être ténue. Et Juliette se mélange parfois un peu les pinceaux. Quand Juliette a vu les attentats du 11 septembre en direct à la télé, elle a voulu consoler sa mère : "C'est pas grave. C'est que dans la télé". Aujourd'hui, elle parle souvent de "Bernaden", un improbable personnage mutant qui réunirait Bernadette et Ben Laden... Juliette sait pourtant bien que Bernaden est "la femme de Chirac" et "qu'elle n'a pas de métier." Et elle n'est pas non plus la dernière à répéter "s'pèce de connasse" comme beaucoup de gamins de son âge. Pour Sophie, les Guignols n'ont bien sûr d'intérêt "qu'avec du recul, au énième degré". Pas facile. Pour Juliette, les Guignols sont plutôt une sorte de défouloir, et attirent par leur aspect transgressif. "Se moquer des grandes personnes, c'est quelque chose d'attirant, surout quand on leur rabâche le respect de l'autre à l'école." La marionnette de Bayrou, jeune benêt simplet et geignant, est ici cathartique. "Il est énervant. Il dit toujours 'mais euh !!!' comme un bébé. Et il dit 'des crottes de nez qui pendent du nez'.", explique Juliette, hilare.

"Sacrée pub !"
Mais pour Bayrou, en l'occurence, le ridicule ne tue pas. "Au début, je trouvais ma marionnette haïssable. Mon personnage était vraiment trop benêt. Mais le temps passant, j'ai évolué. Beaucoup de gens me disaient trouver cela sympa. Cela prouve que vous ne faites pas bien votre métier !" a-t-il expliqué selon le Parisien, lors d'une visite impromptue à la Fnac Etoile, pendant une réunion publique tenue par les auteurs des Guignols. Bruno Gaccio, Guignol en chef, a répondu en riant : "On vous a fait une sacrée pub !" Au-delà de la connivence dans l'échange de bons mots, on comprend le parallèle avec le cas Supermenteur. Interrogé sur sa marionnette sur France 2, Chirac a lui choisi de se montrer bon prince en jugeant que les Guignols relevaient de la "liberté de quolibet". Le président ne rédécouvrait-il pas là une vieille leçon de la communication qui veut que les attaques contre une personnalité comptent moins que le fait qu'on parle de lui ? Supermenteur est bien la star des Guignols et certains craignent même que les Guignols "meurent" s'il n'était pas réélu. Et les ennemis politiques de Chirac l'appellent "Supermenteur" en public, Olivier Besancenot et Le Pen en tête...

Drôle et désobligeant
Evaluer l'influence réelle des Guignols sur le scrutin est difficile. Un sondage, réalisé par Louis Harris les 15 et 16 mars dernier pour VSD : 62 % des sondés trouvent Supermenteur "drôle" (contre 23 %) mais seulement 41 % le trouvent "désobligeant pour le chef de l'Etat" (contre 45 %). 33 % le trouvent la marionnette alter ego de Chirac "fidèle à l'image que vous avez de lui" (contre 52 %). Enfin, 83 % affirment que la marionnette classique de Chirac n'aura "aucun impact sur leur vote", sauf pour 6 % en sa "défaveur" et 4 % en sa "faveur". On a beaucoup reproché aux Guignols d'avoir fait élire Chirac en 1995 en le peignant en loser sympathique annonant sans cesse "mangez des pommes !", un slogan que ses partisans ont même ensuite repris à leur compte. Dans un sondage réalisé par le CSA au soir du premier tour de la dernière présidentielle, 13 % des jeunes interrogés avaient jugé que les émissions satiriques avaient constitué "le moyen le plus utile de faire leur choix". L'émission de Canal Plus fait aujourd'hui 23 % de parts de marché chez les 15-24 ans. Influence réelle ou pas, les Guignols se sont de facto rendus coupables en recadrant la marionnette de Chirac afin de la rendre moins évidemment sympathique. Aujourd'hui, le résultat est plus que mitigé...

Juliette ne s'en soucie guère, elle qui ne devrait se rendre dans l'isoloir que pour accompagner sa mère, si on lui en laisse la permission. "A c't' âge là, on a pas le droit de voter." rappelle-t-elle lucidement. Quand on lui demande si elle ne voudrait pas elle aussi être présidente plus tard, elle s'en défend à grands cris. Mais pourquoi donc refuser ce statut de chef des menteurs, dont tous les enfants devraient rêver ? "Parce que je veux pas être une marionnette !!!".


    Le site des guignols de l'info (canalplus.fr)

    Un épisode de Supermenteur (canalplus.fr)

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"La putain de la république"

  "Parlons français puisque M. Juppé nous a donné l'exemple il y a quelques semaines: il est clair aujourd'hui qu'il y aura une moitié des électeurs de Jean-Pierre Chevènement qui sera politiquement cocue au soir du premier tour" a ironisé Philippe Séguin le 19 février sur France Info. "Aujourd'hui il n'y a pas de problème parce que chaque moitié pense que ça sera à l'autre que cela arrivera."



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