1965-2002
: le film des élections
par Caroline
Cordier - publié le 05/04/02 - Réagir
à cet article sur le forum
La présidentielle, ses stars, son suspense, ses happy
ends... Avant le tournage officiel, petite rétrospective des épisodes
précedents. A vos mouchoirs.
Ca y est. L'équipe de production de la présidentielle
2002 a terminé son casting : une cinquantaine d'appelés, 16 comédiens
retenus. Remarqués dans un premier temps, Nicolas Miguet et Charles Pasqua
ont finalement dû quitter les plateaux. Le Conseil constitutionnel
a attribué à chaque candidat restant son numéro pour la parade et le tournage
va enfin pouvoir commencer. A priori, l'attribution des rôles est très
claire, avec Chirac et Jospin en duo de stars et 14 figurants. Tous les
espoirs leur seront-ils permis en 2007 ? Selon les critiques, le scénario
risque cette année d'être convenu mais, qui sait, sous la pression
des spectateurs, une modification de dernière minute pourrait se produire...
En tout cas, les précédents épisodes avaient déjà réservé quelques
rebondissements. Pour nous rafraîchir la mémoire, une rétrospective des
films présidentiels de la Ve République, produite par presidentielles.net
en Scoop-Panarvision.
Election
présidentielle 1965 |
Tournage |
5 décembre
(1er tour) / 19 décembre (2nd tour) |
Titre
du film |
La Menace
pas si fantôme |
Si
vous avez
manqué le début |
L'élection
présidentielle s'effectue désormais au suffrage universel direct (depuis
la réforme de 1962): la vie politique s'en trouve complètement bouleversée.
Dès 1963, un faux-espoir masculin est annoncé, "Monsieur X", dans
les colonnes de L'Express, dirigé par Jean-Jacques Servan-Schreiber.
Le portrait-robot du candidat correspond à Gaston Defferre, député-maire
socialiste de Marseille. A l'été 1965, faute d'une coalition à gauche,
Defferre se retire de la course. Un homme seul, hors des partis classiques,
émerge: François Mitterrand. |
Caractéristiques
de la promo |
Rôle
primordial de la télévision dans la campagne, les sondages font leur
apparition dans les journaux, débuts timides du marketing politique
(ex: Jean Lecanuet, qui se présente comme le "troisième homme"). |
A
l'Affiche |
6 candidats
sur la scène: un monstre sacré, quelques jeunes premiers… personnages
principaux: Charles De Gaulle, François Mitterrand (révélation masculine)
seconds rôles: Jean Lecanuet (MRP, surnommé le "Kennedy français"),
Jean-Louis Tixier-Vignancour (avocat d'extrême-droite). figurants:
Pierre Marcilhacy, sénateur qui clame que la fonction présidentielle
ne sert à rien ( s'estime compétent donc ?), Marcel Barbu, président
d'une association de petits propriétaires, il offre son temps de parole
aux autres. Recalés au casting (on vous rappellera): Gaston Defferre
(SFIO) |
Rebondissements |
Surprise
de taille: De Gaulle est mis en ballotage au premier tour ! Il entre
alors véritablement en campagne et devient une vedette de télévision.
|
Répliques
cultes |
"Il
y a incompatibilité d'humeur entre De Gaulle et la démocratie" (François
Mitterrand) "Moi ou le chaos" (De Gaulle en annonçant sa candidature) |
Résultats
au box-office |
De Gaulle
13 083 699 voix (55,2%) Mitterrand 10 619 735 voix (44,8%) |
Ils
ont raté la séance |
15,7
% des électeurs (abstention faible) |
Election
présidentielle 1969 |
Tournage |
1er
juin (1er tour) / 15 juin (2nd tour) |
Titre
du film |
Au Nom
du père |
Si
vous avez
manqué le début |
Elections
anticipées. De Gaulle vient de démissionner après que les Français
aient voté majoritairement "non" au référendum sur la régionalisation,
organisé la même année. Alain Poher, président du Sénat assure l'intérim
de la présidence, comme le veut la Constitution. L'angoisse du "chaos"
promis par de Gaulle à sa suite s'estompe au fil de la campagne. |
Caractéristiques
de la promo |
Assez
calme, brève. Pas de gouffre idéologique entre les principaux compétiteurs
! Certains observateurs ont parlé de "campagne américaine" car les
candidats travaillent plus leur image qu'ils ne mettent en avant leur
projet politique. La télévision et les sondages sont entrés dans les
mœurs politiques). |
A
l'Affiche |
7 candidats
sous les projecteurs: personnages principaux: Georges Pompidou ("dauphin
du Général"), Alain Poher (Union des républicains et de la réconciliation
des Français) seconds rôles: Jacques Duclos (PC), Gaston Defferre
( socialiste, pas recalé au casting comme en 1965) figurants: Michel
Rocard (Parti Socialiste Unifié), Louis Ducatel (entrepreneur en travaux
publics en mal de publicité), Alain Krivine (Ligue communiste, extrême-gauche)
recalés au casting (on vous rappellera): François Mitterrand (décrédibilisé
par son attitude en mai 1968) |
Rebondissements |
(somme
toute peu attentatoires à la santé cardio-vasculaire des observateurs)
On peut noter le bon score du Parti communiste au 1er tour; Duclos
arrive 3ème avec 22% des voix. Conséquence statistique logique: il
ne reste pas moults bulletins pour les socialistes. La SFIO est mo-"rose".
L'élection de Pompidou pérennise de facto les institutions et met
fin à la "guerre des Républiques". |
Répliques
cultes |
Le Parti
communiste estime que choisir entre Poher et Pompidou au second tour
c'est "bonnet blanc et blanc bonnet". Duclos aurait dit officieusement
"c'est la peste et le choléra". |
Résultats
au box-office |
Georges
Pompidou : 11 064 371 voix (58 %) Alain Poher : 7 943 118 voix ( 42
%) |
Ils
ont raté la séance |
31,1
% des électeurs (taux d'abstention record) |
Election
présidentielle 1974 |
Tournage |
5 mai
(1er tour) / 19 mai (2nd tour) |
Titre
du film |
Les
Aventures du baron de Chamalières |
Si
vous avez
manqué le début |
Elections
anticipées suite à la mort de Georges Pompidou. Alain Poher (surnommé
Manpower) assure à nouveau l'intérim. Dans la majorité se multiplient
les querelles de personnes, notamment entre gaullistes et giscardiens.
La gauche suit une stratégie d'union: en 1971 a été créé le Parti
socialiste, lors du Congrès d'Epinay. François Mitterrand, qui n'a
jamais appartenu à la SFIO est nommé 1er secrétaire du PS. En 1972
est publié un programme commun PS/PCF. |
Caractéristiques
de la promo |
Au 1er
tour, la majorité est désunie et les candidats entrent en conccurrence.
Jacques Chaban-Delmas, impatient, réalise une faute stratégique voire
une gaffe énorme: annonce sa candidature alors que l'oraison funèbre
pour Georges Pompidou vient à peine d'être prononcée…Au 2nd tour,
on assiste à un véritable débat de société. La campagne est de haut
niveau, gauche contre droite. Le face à face télévisé fait son apparition
et constitue le point d'orgue du débat. |
A
l'Affiche |
12 candidats
(c'était le record jusqu'à cette année) : personnages principaux:
François Mitterrand, Valéry Giscard D'Estaing seconds rôles: Jacques
Chaban-Delmas figurants: Jean Royer ( droite, maire de Tours, ministre
de l'Artisanat et du Commerce) , Arlette Laguiller ( la lutte est
déjà finale mais la carrière de candidate commence, cette année 5ème
candidature, recordwoman), René Dumont (écologiste), Jean-Marie Le
Pen (Front National, ex-député poujadiste), Emile Müller (maire de
Toulouse, social-démocrate), Alain Krivine ( trotskiste), Bertrand
Renouvin (monarchiste ), et deux fédéralistes (programmes européens)
Jean-Claude Sebbag, Guy Héraud. |
Rebondissements |
L'écart
entre les giscardiens et les gaullistes au soir du premier tour est
important: Valéry Giscard D'Estaing obtient 33% contre 15% à Chaban.
Pour ce dernier, c'est un échec. Mitterrand, en revanche, fait un
score de titan : 43% des suffrages, voila qui ferait rêver n'importe
quel prétendant en 2002 ! Mais l'Union ne suffira pas. A 600 000 voix
près, VGE l'emporte le 19 mai, au terme d'un entre deux tours palpitant.
|
Répliques
cultes |
Giscard
D'Estaing à l'annonce de sa candidature, regarde la France "au fond
des yeux" depuis sa mairie de Chamalières "Vous n'avez pas le monopole
du cœur" ( Giscard D'Estaing à Mitterrand) , "Je serai l'homme de
la réconciliation" (Mitterrand). |
Résultats
au box-office |
VGE
13 396 203 voix (50, 81%) Mitterrand 12 971 604 voix (49,19%) |
Ils
ont raté la séance |
12,66
% des électeurs (abstention la plus basse de la Ve République) |
Election
présidentielle 1981 |
Tournage |
26 avril
(1er tour) / 10 mai (2nd tour) |
Titre
du film |
Les
Diamants ne sont pas éternels |
Si
vous avez
manqué le début |
La majorité
et l'opposition sont complètement désunies. A droite, la rupture est
entamée depuis la démission de Jacques Chirac en 1976, alors 1er ministre
de VGE. Les gaullistes reviennent en force par rapport aux centristes.
A gauche, l'Union a explosé en septembre 1977: Rocard et Mitterrand
s'opposent. Des pétitions contre le second circulent dans les rangs
du PS. |
Caractéristiques
de la promo |
révélation
masculine; Jacques Chirac s'épanouit en campagne. C'est un réél homme
de communication. VGE au contraire change constamment d'image: candidat
? Président sortant ? On ne sait jamais qui parle. Il est de plus
gêné par le scandale des "diamants de Bokassa". Le débat télévisé
au second tour tourne à l'avantage de F. Mitterrand. |
A
l'Affiche |
10 candidats
sous les feux de la rampe: personnages principaux: VGE, François Mitterrand
(3ème tentative), seconds rôles: Jacques Chirac (RPR), Georges Marchais
(PC), figurants: Brice Lalonde (écologiste), Arlette Laguiller (2ème
tentative), Michel Crépeau (radical de gauche), Michel Debré (gaulliste),
Marie-France Garaud (ex-conseillère de Georges Pompidou), Huguette
Bouchardeau (extrême-gauche).
Recalés lors du casting: Le Pen et Coluche |
Rebondissements |
Jacques
Chirac soutiendra VGE du bout des lèvres au second tour. A l'inverse,
Georges Marchais, en marge de la position officielle (soutien à Mitterrand),
fait passer l'idée que voter de manière révolutionnaire serait voter
pour VGE ! |
Répliques
cultes |
"Il
faut un Président à la France" VGE au 1er tour ( sous-entend que le
trône est vide ?) "Le 10 mai nous sommes passés de l'ombre à la lumière"
(Jack Lang, césar du lyrisme) Slogans: "La force tranquille" (François
Mitterrand) Magnéto: VGE fait ses adieux aux Français, quitte la pièce
pendant la Marseillaise tandis que la caméra filme la chaise vide. |
Résultats
au box-office |
François
Mitterrand 15 708 262 voix (51,75%) Valéry Giscard d'Estaing 14 642
306 voix (48,25%) |
Ils
ont raté la séance |
14,13%
des électeurs |
Election
présidentielle 1988 |
Tournage |
24 avril
(1er tour) / 5 mai (2nd tour) |
Titre
du film |
Un Pittbul
dans un jeu de quilles |
Si
vous avez
manqué le début |
La France
a découvert la cohabitation. En 1986, les socialistes ont perdu les
législatives et Jacques Chirac est nommé à la tête du gouvernement.
Le schéma est inédit : le Président sortant est opposé à son Premier
ministre. |
Caractéristiques
de la promo |
La campagne
est assez peu idéologique, mises à part les déclarations de Jean-Marie
Le Pen. Ce dernier nourrit une haine farouche à l'encontre de Jacques
Chirac.. |
A
l'Affiche |
9 candidats
sélectionnés personnages principaux: François Mitterrand ( 4ème campagne),
Chirac (2ème essai) seconds rôles: Raymond Barre, Jean-Marie Le Pen,
figurants: André Lajoinie (PC), Antoine Waechter (écologiste), Pierre
Juquin (ancien dirigeant du PC), Arlette Laguiller (3ème apparition),
Pierre Boussel (extrême-gauche).
Recalés au casting (on vous rappellera): Michel Rocard (Mitterrand
lui promet le poste de 1er ministre) |
Rebondissements |
Percée
spectaculaire du FN au premier tour! Le Pen réunit 14,39 % des suffrages.
A titre de comparaison: Chirac 19,94 %, Barre 16,54 %. A l'inverse,
les résultats du PC sont catastrophiques: Lajoinie fait un score de
6,76 %. |
Répliques
cultes |
"Je
vous laisse choisir entre le pire et le mal" (Le Pen à ses électeurs,
consigne au 2nd tour, tout en excluant de voter pour Mitterrand).
Lors du débat TV au 2nd tour: Jacques Chirac : "Permettez-moi juste
de vous dire, que, ce soir, je ne suis pas le Premier ministre et
vous n'êtes pas le président de la République. Nous sommes deux candidats
à égalité. Vous permettrez, donc, que je vous appelle monsieur Mitterrand."
François Mitterrand : "Vous avez raison, monsieur le Premier ministre".
|
Résultats
au box-office |
François
Mitterrand 16 704 279 voix (54,01%) Jacques Chirac 14 218 970 voix
(46,98 %) |
Ils
ont raté la séance |
15,70
% de tickets invendus |
Election
présidentielle 1995 |
Tournage |
23 avril
(1er tour) / 7 mai (2nd tour) |
Titre
du film |
Petits
Meurtres entre amis (de trente ans) |
Si
vous avez
manqué le début |
Aux
législatives de 1993, l'opposition RPR/UDF a réalisé un score considérable.
La cohabitation est à l'avantage du Premier ministre, aux pouvoirs
très étendus. Mitterrand surnomme Balladur "l'étrangleur oriental".
La gauche est en pleine déconfiture (quel candidat va aller au "casse-pipe"
?). L'UDF n'a aucun postulant à proposer. Jacques Chirac s'inquiète
des projets de son "ami de 30 ans" Edouard, qui se voit déjà au sommet. |
Caractéristiques
de la promo |
influence
officieuse (mais importante) des Guignols de l'info, multiplicité
des candidats "virtuels", clairvoyance illusoire des sondages. A gauche,
on supplie Jacques Delors de s'y coller ( "l'Arlésienne": tout le
monde en parle mais on le voit peu). Jack Lang, Henri Emmanuelli sont
prêts à se sacrifier. Les militants désigneront finalement Jospin,
qui songeait à se retirer de la vie politique...! Il avait demandé
à Alain Juppé de lui trouver une ambassade. |
A
l'Affiche |
9 candidats
montent les marches personnages principaux: Lionel Jospin (PS), Jacques
Chirac (3ème tentative), Edouard Balladur ( surnommé Doudou) seconds
rôles: Jean-Marie Le Pen ( 3ème fois), Robert Hue (PC) figurants:
Arlette Laguiller (4ème tentative), Philippe De Villiers, Dominique
Voynet (écologiste), Jacques Cheminade ( obscur inconnu) recalés au
casting: Michel Rocard (à cause d'un mauvais score aux européennes),
Jacques Delors (a peur des sunlights ?). |
Rebondissements |
Echec
des sondeurs ! Jacques Chirac fera une meilleure campagne que Balladur,
trop froid. Le premier est soutenu par Alain Juppé, Philippe Séguin,
Alain Madelin ( tous sur les rangs pour gouverner), VGE (étonnant
non ?) et certains mitterrandiens (voire le Président lui-même). Le
second est loué par l'UDF et une partie du RPR. Au 1er tour, surprise:
Jospin est en tête, Balladur 3ème ! Il appelle tout de suite à voter
pour la droite, Le Pen insinue que Lionel Jospin est plus fréquentable.
Le débat du 2nd tour sera courtois, peu politisé. En fait, chacun
semble déjà positionné dans son futur statut. |
Répliques
cultes |
"Je
vous demande de vous arrêter" (Balladur), "Je ne remets pas en cause
votre bonne volonté, ce que je remets en cause c'est votre ambition"
(Chirac à Jospin). |
Résultats
au box-office |
Jacques
Chirac 15 763 027 voix (52,64%) Lionel Jospin 14 180 644 voix (47,36%) |
Ils
ont raté la séance |
20,3%
des électeurs (si l'on ajoute à l'abstention les bulletins blancs
ou nuls, aucun candidat n'a obtenu la majorité absolue) |
|