Olivier
Besancenot, candidat de la LCR
"Les
attentats masquent les vrais problèmes."
par Xavier
Molenat - publié le 09/02/02
Le
jeune candidat de la Ligue Communiste Révolutionnaire a tenu son
premier meeting le 20 décembre. Il dénonce les faux-semblants
de l'après-11 septembre et appelle... à la révolution.
Interview.
Pour Olivier
Besancenot, on vit dans un monde de dingues. Pour nous en convaincre,
le candidat de la Ligue communiste révolutionnaire a choisi de
commencer son premier meeting par une analyse de la situation internationale
après le 11 septembre. Le 20 décembre, face à une
vingtaine de militants réunis dans la Maison des associations de
Malakoff, Olivier Besancenot défend la ligne "internationaliste"
: ni talibans, ni bombardements. Le plus jeune candidat à la présidence
(27 ans) juge bien sûr les attentats du World Trade Center "choquants"
et exprime sa "solidarité" envers les victimes, mais
il refuse tout autant le "garde-à-vous" devant Bush.
En dénonçant talibans et Etat-Unis comme deux "obscurantismes",
il envoie aussi une pique au Parti communiste et aux Verts, qui ont suivi
le gouvernement Jospin dans son soutien officiel à l'offensive
américaine. En candidat de la gauche de la gauche, Besancenot dénonce
le "climat sécuritaire" qui s'est emparé de la
France, notamment depuis la Loi relative à la Sécurité
Quotidienne (LSQ), un texte d'inspiration anti-terroriste voté
en novembre, jugé liberticide par beaucoup. Pour le candidat de
la LCR, tout est lié : l'omniprésence du débat sur
la sécurité dans la campagne présidentielle masque
ainsi les vrais problèmes des travailleurs. On ne parle plus de
l'emploi, ni de la grève des éducateurs... Les attentats
sont le prétexte d'une "nouvelle offensive du patronat"
dans sa "guerre contre le monde du travail". L'époque
voudrait même "faire passer les victimes pour les coupables",
comme en témoigne la criminalisation récente des luttes
contre les OGM ou du mouvement pour une autre mondialisation. La cible
est ici le gouvernement socialiste, qui "laisse le chômage
et la précarité se maintenir" et "finance les
cliniques privées". En guise de solution, Besancenot propose
la création d'un "nouveau parti des travailleurs, anti-capitaliste,
féministe et écologiste", conformément à
la ligne révolutionnaire de la LCR. Concrètement, le candidat
esquisse quelques mesures : moratoire sur les OGM, refus de la reconstruction
de l'usine AZF, hausse de 225 ? (1 500 F) des salaires, transparence des
comptes des entreprises... On n'en saura pas beaucoup plus. En conclusion,
celui qui travaille encore comme facteur a beau jeu de rappeler que "la
politique ne doit pas devenir un métier" : "La France
d'en-bas, on la connait. ce sont des millions d'inconnus, comme moi".
Interview.
Vous avez
commencé votre discours en évoquant la situation en Afghanistan.
Pour quelle raison ?
Je pense
que c'est l'illustration du monde actuel, un monde qui tourne complètement
à l'envers. Ce qui était le plus symptomatique de ce monde
qui tourne à l'envers, c'était le 11 septembre, avec les
attentats d'un côté, les bombardements de l'autre. Pour nous,
c'est rajouter du chaos au chaos, une catastrophe qui succède aux
précedentes. Donc, pour des révolutionnaires, prendre l'angle
du "monde à l'envers", pour proposer une politique qui
propose de remettre ce monde à l'endroit, c'est aussi prendre l'exemple
de ce qui a fait discuter des millions de personnes en France, c'est-à-dire
la guerre en Afghanistan.
Vous avez
aussi beaucoup insisté sur les jeunes et sur les mouvements pour
une autre mondialisation. Est-ce la cible électorale de la LCR
?
Il y a pas
mal de jeunes parmi les participants mais je crois que, plus généralement,
il y a un renouveau de la situation politique depuis quelques années
maintenant. Et nous, on parie sur le renouveau de cette situation sociale,
pour qu'elle se transforme en nouvelle situation électorale. Et
pour incarner ce renouveau, on propose de s'appuyer et de proposer une
nouvelle politique à tous les nouveaux mouvements sociaux qui existent
depuis plusieurs années, que ce soit les sans-logis, les sans-papiers,
le mouvement de résistance à la mondialistation libérale,
que ce soit les nouveaux syndicats qui apparaissent, les nouvelles associations...
pour apporter une vision plus globale et un peu de sang neuf dans une
classe politique largement déconnectée.
Vous dites
vous-même qu'il y aurait dû y avoir une candidature unitaire
Lutte Ouvrière-LCR aux élections présidentielles.
Cela ne s'est pas fait. Comment faites-vous pour vous exister à
côté d'Arlette Laguiller, plus populaire et mieux connue
des électeurs ?
Nous, on
regrette son sectarisme, on pense qu'on aurait dû faire union. Maintenant,
on pense que les gens feront l'addition des deux scores aux élections
et on ne se présente pas pour faire la différence avec Arlette
Laguiller. Arlette Laguiller, ce n'est pas mon adversaire dans cette campagne.
J'ai beaucoup de respect pour elle, pour son combat, et on se retrouve
dans toute une série de luttes. Elle est toujours dans le camp
des travailleurs, on est dans le même camp. Je crois que la seule
différence, c'est qu'on n'a pas forcément la même
appréhension de ce camp-là : pour nous, le camp des travailleurs
est peut-être plus large que dans sa conception à elle. Il
passe par Gênes, par Seattle, il passe par les mobilisations de
Bruxelles, les mobilisations écologistes, il passe par les mobilisations
des sans-papiers.
Comment
vivez-vous votre passage du statut de simple militant à celui de
candidat aux élections présidentielles ?
C'est toujours
un peu compliqué. Je crois que la démonstration qu'on veut
apporter, c'est qu'un jeune salarié peut défendre des idées
et que ça n'est pas réservé à des politiciens
professionnels. Pour des jeunes salariés, même militants,
ça implique de se faire un peu violence et de se présenter
à des élections. Même quand on continue à travailler,
comme c'est mon cas actuellement. Ca laisse peu de temps libre pour rester
dans le bain quotidien de la formation et des arguments, mais ça
ne nous empêche pas de proposer une politique tout aussi globale
que les autres candidats.
Comment
va se poursuivre votre campagne ?
Là
ça va s'intensifier. On va inaugurer une série de meetings
publics, beaucoup plus grand public, et puis à partir de mars jusqu'à
fin avril, ce sera un meeting par soir.
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